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Le droit, la loi, la justice

Quand il faut parfois comprendre certains termes pour comprendre le libre !
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Droit et licences

Esprit du libre

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–  dimanche 14 janvier 2007, par Julien Tayon

Combien de fois sur LinuxFr, Framasoft ou dans les entreprises entend-t-on : « le libre, c’est bien, c’est généreux, mais alors que le monde est injuste est méchant comment me garantit-il mes revenus, que je ne serais pas copié, spolié... »

Comment ? Eh bien c’est ce mécanisme qui est expliqué ici même en avant première pour vous :)

Il est un premier point qu’il faut éclaircir malgré l’entêtement de nos journaux nationaux à expliquer le contraire pendant les fêtes : le père Noël n’existe pas ! De la même manière, une fois une loi élaborée et votée par les représentants du peuple, il n’existe pas un croque-mitaine ectoplasmique qui voit tout et qui sait tout qui va faire respecter la Loi et lutter contre les injustices. En fait, c’est un peu faux, ce croque-mitaine existe, et c’est vous ! Voilà le premier secret d’un état de droit.

Qu’est ce qu’une injustice ?

Une injustice arrive quand quelqu’un vient polluer les forums en disant qu’untel n’est pas gentil avec lui, et par ailleurs envoie balader tous les internautes qui lui disent : « si tu es dans ton bon droit, au lieu de te plaindre et de nous casser les pieds, agis ! » Une injustice est avant tout un ressenti personnel lié à une morale et à des valeurs. Comme nous n’avons pas tous les mêmes morales, les mêmes valeurs, mais que nous sommes condamnés à vivre ensemble, une chose merveilleuse a été instaurée depuis que les hommes commercent entre eux de la Chine à l’Europe en passant par l’Orient [1], on appelle ça le droit. C’est une plate-forme de mécanismes qui limitent nos relations aux autres, limitant autant ce que l’on peut faire subir aux autres, que ce que l’on peut subir. C’est ainsi que nos civilisations ont pu se bâtir sur la base a minima du droit à assurer l’existence d’un commerce de la soie, du poivre ...

Ces limites et ces libertés sont inscrites dans des textes appelés les lois. Le droit d’auteur est défini par une loi, et appliqué au moyen d’un mécanisme appelé Justice dont la principale énergie est... vous ! Soyons pratiques :

Le libre ça pue, j’ai mis un texte sous licence libre, et on m’a copié.

Ben oui, coco, il y a des gens méchants. Mais ce qui retient les gens méchants d’agir, ce n’est pas la peur des croque-mitaines. Donc si tu veux que ton droit soit respecté, il faut demander à la Justice de faire appliquer la Loi.

Si tu n’es pas content :

  1. tu fais constater le délit de contrefaçon par des témoins, et si possible un huissier assermenté ;
  2. tu commences par tenter une procédure à l’amiable où tu expliques aux personnes qui peuvent être concernées (auteur de la contrefaçon, hébergeur, sponsor...) ton différend ;
  3. tu évalues quelle est la juridiction où tu as le plus de chance de gagner ;
  4. tu formules ta plainte ;
  5. tu la déposes ;
  6. tu attends que la justice délibère, et si tu es pas joisse, tu interjettes appel ;

Certes ça prend du temps, mais pourquoi réclamer à ses élus des droits que l’on trouve importants si, quand ils sont bafoués, on ne trouve pas important de les défendre ?

C’est ça vivre dans un état de droit : pour qu’il soit pérenne, il faut défendre son droit quand il est bafoué.

Un certain nombre de droits français sont probablement tombés en désuétude car les citoyens ne sentaient pas aller devant les tribunaux pour les défendre (je pense aux droits d’aller chercher des fagots dans les forêts domaniales, des droits régionaux octroyés par le Roi, non révoqués par la République, comme l’interdiction pour les bretons de payer des octrois, ou le devoir de laisser tout citoyen pisser dans ses facilités...). Le Droit se repose non seulement sur la Loi pour décider mais aussi sur les pratiques précédentes. Si demain, les auteurs qui se font copier sont trop fainéants pour porter plainte et que cela devienne une habitude, pourquoi condamner sévèrement les contrefacteurs qui, par ailleurs, peuvent générer des revenus pour la population tout entière ? Qu’est-ce qui est moralement le plus juste, le respect du droit d’auteur ad nihilo, ou de garantir les revenus ?

Celui qui répondra à la question sera le législateur (député) que vous allez élire et qui amendera la Loi dans le sens que vous donnerez, mais aussi le juge qui se basera sur les décisions prises précédemment, mais, pour cela, il faut qu’il y ait des décisions.

Le logiciel libre propose des droits et des devoirs à ceux qui utilisent les contenus, mais il est de la seule responsabilité des ayant droits, c’est à dire souvent des auteurs, de les faire respecter. En tout état de cause : ne pas défendre un droit, revient à l’enterrer

Revenus liés aux oeuvres de l’esprit

Le reproche majeur fait au logiciel libre c’est de ne pas proposer de business model [2], ou alors de ne pas dire comment gagner de l’argent avec une oeuvre.

Le logiciel libre utilise la Loi pour accorder des droits, ces droits sont une base pérenne pour pouvoir générer des revenus en ayant une certaine sécurité. Le risque est le premier ennemi du business, le logiciel libre diminue les risques de contentieux. En ceci il lève des freins pour faire le négoce d’une oeuvre collective. Mais autant un moteur sans frein est certainement plus efficace pour avancer, autant un moteur qui ne tourne pas, même sans freins, ne peux pas avancer ; pour cela, le possesseur du moteur doit trouver une source d’énergie pour le faire tourner.

Dans le domaine du logiciel libre, il est clair que c’est de la responsabilité des auteurs de faire tourner ce moteur, et de trouver les source de revenus.

Sans être dans le secret des dieux, il faudra commencer par trouver des gens prêt à acheter un service ajoutant de la valeur à une oeuvre. Comme les auteurs sont capables de pondre une oeuvre protégée par son caractère original, les auteurs trouveront sûrement une idée originale pour valoriser leur création.

Mais c’est triste la vie

Oui, la vie est triste ! Que ce soit dans le domaine du travail, du logement, de la création le seul moyen d’avoir des droits effectifs, c’est d’aller devant un tribunal les faire respecter. Le logiciel libre accorde des libertés, des droits, si vous voulez qu’ils soient une réalité, c’est à vous, auteurs et ayant droit, de les faire respecter. Mais ces droits ne vous garantissent ni le succès, ni la repousse des cheveux, ni des revenus réguliers.

Le logiciel libre est un support. Cependant, en aucun cas un support qui peut se substituer à vos responsabilités. Si vous ne vous sentez pas défendre vos droits, ou trouver par vous-mêmes des sources de revenus autour de vos créations, de grâce, ne venez pas dans le logiciel libre : il est probable que vous n’ayez pas la mentalité qui permettrait de monter une entreprise à caractère économique, bénévole ou social de toute façon.

Pour en revenir à la société dans sa réalité sociale, on fera abstraction des entreprises du CAC40 qui font réguler légalement leur secteur d’activité afin de ne pas avoir de concurrence, et d’assurer leurs revenus sans prendre de risque [3].
Cependant le citoyen ne disant rien à ses députés, ne faisant pas valoir ses droits devant les tribunaux, où est le mal ?

Les premiers artisans des injustices dans un états de droit ne sont pas ceux qui commettent des activités non conformes au Droit, mais les victimes qui ne font ni valoir leurs droits auprès des tribunaux, ni valoir leurs doléances auprès de leurs représentants. Les citoyens d’un état de droit vivent sur les dividendes des actions de leurs aïeux, et façonnent le futur par leurs (in)actions. Il en va du logiciel libre comme de la société, l’artisan de la justice (présente, passée et à venir) est le citoyen lambda.

[1soit depuis quelques millénaires avant la naissance du christianisme.

[2un business model est une recette toute fait pour gagner de l’argent avec une activité donnée. On francise cette expression en « modèle économique ».

forum

  • > Le droit, la loi, la justice
    18 avril 2007, par amine

    bonjour !
    Vous parlez de loi,donc de droits et de justice.Vous parlez aussi de leur position morale.Je vous comprend tout a fait.Malgres vos exemples un peut particuliers pour moi qui ne suis pas de meme profession que vous mais simplement un bachelier s’interessant a cette problematique:la justice peut elle se passer du droit ?grace a la quelle j’ai rencontrai votre aticle.Je sais !ce n’est pas ce que vous essayez tout a fait eclaircire.Simplement voila et ca m’interesse:vous reclamez contre l’injustic,donc pour la justice.Et vous parlez directement de liberté.D’apres vous est ce que le droit et la justice du point de vu moral veulent dire liberte ?sans la quelle il n’ya pas de justice ?

    • > Le droit, la loi, la justice
      18 avril 2007

      je voulais répondre à votre message qui m’a semblé dailleur très interressant car vous ne m’avais pas très bien compris quand je parle de justice vous comprener directement qu’il sagit de lois ou de trucs comme ça or la justice a plusieur dimaine encore !!! mais je ne vais pas trop tourner autours du pos donc voilà moi ce que j’ai a dire c’est que la justice est là pour nous proteger et que par ailleur elle contient des lois.. et qu’on a l’obligence de réspecter. Donc oui la justice signifie bcp de chose ...
      j’esper avoir été clair cette fois. meilleurs salutations à vous chèr madame.

      • > Le droit, la loi, la justice
        3 mai 2007, par Julien Tayon

        Ce qui paraît juste, est du domaine ou de l’éthique individuelle, ou de la morale collective (souvent religieuse).
        Le droit est un mécanisme de création (à l’assemblée) et d’ajustement (par les jurisprudences) de texte afin d’avoir une société ou la notion de juste soit conforme à tous.
        La loi et le résultat du mécanisme, les plus vieilles lois sont comme des galets polis par les ans, simples et intemporelles.

        Mais pour une société de droit, le moteur est un citoyen et une constitution. La constitution est sensée condenser l’esprit de la loi. Quand la constitution déclare que l’on naît libres et égaux en droit, elle implique que si l’on se sent lésé(e) en terme de liberté ou d’égalité, il y a une loi qui vous protège. Comme il ne peut y avoir un juge et un policier derrière chaque individu, le citoyen a pour devoir pour que la société soit libre et égale quand il est floué de porter plainte. Il agit comme un agent de l’état. La constitution est une déclaration d’intention, et non la réalité. La loi en ceci est secondaire.

        Si les citoyens renoncent à porter plainte, par confort, par peur ou par manque de temps alors l’égalité, la liberté sont fragilisées car de plus en plus souvent bafouées. A force d’être bafouées, elle deviennent des mots vains.

        Au final, celui ou celle qui renonce à un peu de liberté pour des raisons de confort (ou de sécurité) perd tout.

        L’idée de ce texte, était de démêler une confusion entre le droit (le système organique et évolutif dans lequel nous vivons tous les jours), la morale (souvent privée qui dicte des sens de la justice parfois en conflit les uns avec les autres), et la loi (les textes issus du compromis entre les morales privées), et de rappeler que la loi n’est pas comme un édit divin qui résoudrait de manière omnisciente et omnipotente nos problèmes particuliers. Les élus, les juges, les policiers, les citoyens ne sont pas des dieux, juste des Hommes, et des Femmes. La seule chose qui tient le système c’est le dialogue raisonnable qui permet de faire évoluer pas à pas les choses, ce qui le détruit ce sont les attentes irraisonnées qui forment les déceptions destructrices, et les renoncements.

        En fait, ce qui m’ennuie, ce sont les individus qui se plaignent de situation qu’ils savent contraire à l’esprit de la loi, et qui au lieu d’aller devant les tribunaux vont soit se laisser opprimer en sanglotant, soit essayer de négocier leur pouvoir de nuisance au lieu de saisir la Justice (je met une majuscule car il s’agit de l’institution). Il est devenu dur et courageux, voir rebelle de faire appel à la raison plutôt qu’à l’émotionnel dans le merveilleux microcosme des médias de masse et alternatifs. Si on suit le raisonnement jusqu’au bout, victimes et bourreaux sembles devenir les seuls choix que nous ayons. C’est ce que l’on appelle la loi du plus fort. Mais c’est une autre histoire.

        PS quand je parle de la justice (avec une minuscule) je ne parle PAS de l’institution.